Prédation : Lettre ouverte à l’attention des Ministres en charge de l’agriculture et de l’environnement

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Lettre ouverte à l’attention des Ministres en charge de l’agriculture et de l’environnement

Prédation : 22 organisations agricoles alertent une nouvelle fois sur les conséquences dramatiques causées par les attaques de loup

 

Plusieurs organismes professionnels agricoles se sont organisés pour vous faire parvenir ce courrier rendant compte de nos inquiétudes partagées dans différents territoires concernant la prédation lupine.

 

Les constats d’attaques de loups ont explosé ces cinq dernières années en Bourgogne-Franche-Comté, passant de 8 élevages touchés en 2018 à 119 en 2023. Aucun département n’est désormais épargné. De plus, le loup s’implante durablement dans la région avec l’installation de meutes dans le Jura et des zones de présence permanente en Saône-et-Loire. Près de 360 victimes sont déjà à déplorer depuis le début de l’année 2024.

 

Au niveau national, la population de loup, jusqu’ici « strictement protégée » par la convention de Berne et la directive Habitats, ne cesse d’augmenter et dépasse largement le seuil de viabilité fixé à 500 individus. Alors que le Plan national d’actions (PNA) a pour objectif de préserver également l’élevage, la baisse de 9% de leur population mentionnée par l’OFB dernièrement n’est absolument pas perceptible par les éleveurs au regard de l’augmentation des attaques et des nouveaux territoires colonisés. Le bilan de la prédation est lourd : plus de 15 000 animaux domestiques sont tués, disparus ou blessés chaque année (source : Inrae Avril 2020), dans des conditions de souffrance inacceptables.

 

Après 30 ans de présence des loups, le constat est sans appel : les faits sont là, la cohabitation est impossible. Nous estimons que l’économie et la vie de nos territoires, la préservation de l’activité d’élevage valent bien plus que la protection d’une espèce qui n’est désormais plus menacée. Les mesures de protection mises en place à des coûts exorbitants pour le contribuable (66 M€ minimum dont 56,02 M€ de crédits publics) n’apportent pas une protection suffisante puisque 92% des troupeaux attaqués dans les Alpes sont protégés (Meuret et Régner, Avril 2020). Le travail engagé en région Bourgogne Franche comté, soulignant la volonté de la profession agricole de trouver des solutions, ne conduit jusqu’ici à identifier aucune piste satisfaisante.

 

L’impossibilité d’une cohabitation avec les loups est largement reconnue et documentée par la communauté scientifique, tout comme l’intérêt de l’élevage de plein air qui est en phase avec les changements climatiques actuels et à venir, par sa capacité notamment à entretenir les prairies captant et stockant le carbone.

 

Cette menace permanente a de nombreuses conséquences économiques et psychologiques sur les éleveurs, leur famille et sur le monde rural en général. Elle entraîne la mort des petites exploitations en priorité, rapidement fragilisées en cas d’attaque et pourtant garantes de l’entretien d’une bonne partie du territoire, de sa dynamique, et de sa biodiversité tout en proposant des produits de haute qualité. Elle interroge les jeunes qui se destinent à reprendre des exploitations d’élevage.

 

Outre les aides pour la protection des troupeaux, l’Etat a mis en place une seconde réponse avec le quota d’abattage de loups, appelé « plafond de prélèvement ». Mise en place sérieusement, cette seconde mesure semble être la seule qui laisse entrevoir une stabilisation du nombre de victimes en freinant la croissance de la population lupine (à condition qu’elle soit correctement évaluée).

 

Au niveau mondial, l’espèce Canis Lupus est classée en préoccupation mineure quant à son risque d’extinction. En France, elle est classée dans la catégorie « vulnérable », et non pas « en danger » ni « en danger critique ».

Après les annonces de Mme Von Der Leyen, la Commission Européenne et la Convention de Berne ont exprimé une volonté claire de déclasser le statut du loup d’espèce « strictement protégée » à « protégée ». Cette action serait enfin une réponse cohérente à la détresse des éleveurs qui dure depuis plus de trente ans. Dans la foulée, les instances françaises devront modifier le plan loup en conséquence comme cela est mentionné.

 

Les éleveurs de douze pays Européens, démunis par l’absence de réponse de leurs représentants politiques respectifs, se sont réunis le 29 novembre 2022 à Saint Jean de Bournay (38). Le constat est accablant. La problématique est la même dans tous les pays. On estime qu’il y a plus de 20 000 loups sur le territoire Européen, occasionnant plus de 65 000 victimes chaque année.

Dans l’attente d’un déclassement au niveau de la Directive Habitats, dont les discussions sont en cours, il existe dans ces deux traités des possibilités de déroger à la surprotection quand la situation est dans une impasse, ce qui est le cas aujourd’hui pour le monde de l’élevage de plein air (articles 16 de la Directive Habitats et 9 de la convention de Berne).

L’Etat a les moyens juridiques de mettre en place une vraie régulation. Certains pays d’Europe comme la Suède qui a également ratifié les documents cités plus haut ont fait le choix de tripler leur quota de prélèvement pour maintenir la population lupine à un seuil viable pour l’espèce sur le territoire, mais vivable pour les activités humaines.

Il est plus que temps de rappeler les vertus du pastoralisme et de l’élevage de plein air à de nombreux niveaux (environnemental, économique, social par solidarité entre les territoires et les générations…) reconnues par des lois successives depuis 1972 qui ne demandent qu’à être appliquées, notamment les articles L113-1 et L113-2 du Code Rural mais aussi classé au patrimoine mondial de l’Unesco à travers l’inscription du territoire Causses et Cévennes.

Par ailleurs, les mesures intégrées dans le nouveau Plan National d’actions nous semblent encore insuffisantes pour garantir la protection de nos élevages. Ainsi, nous souhaitons obtenir les améliorations suivantes :

  • Augmenter les quotas de prélèvement pour pouvoir maintenir la population à 500 loups maximum.
  • Elargir les tirs de défense simple à l’ensemble d’un territoire et non plus à une seule exploitation, en laissant une marge d’appréciation à l’échelle locale afin que ce type de mesure puisse être effectivement mise en œuvre.
  • Augmenter les moyens humains, matériels et juridiques des brigades loups en les précisant explicitement (nombre, montants, modalités).
  • Mettre en place des actions concrètes pour limiter la charge financière et la charge supplémentaire de travail pour les éleveurs, notamment pour l’enlèvement et la recherche des carcasses à la suite des attaques de troupeaux.

Les décisions que vous prendrez sur ce sujet éminemment sensible sont d’une importance capitale pour l’avenir de l’élevage de plein air, garant d’une agriculture respectueuse de l’environnement et du bien-être animal. Nous aimons nos campagnes et voulons faire entendre la voix des acteurs de terrain qui tous les jours constatent la détresse et le sentiment d’abandon des éleveurs face à ces attaques. 

©Unsplash, ©Chambres d'agriculture de BFC, ©Image générée par IA
 

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